St Kilda immersion dans une nature préservée
L’archipel de St Kilda est de par sa position géographique un lieu à part. C’est le point d’Ecosse le plus avancé dans l’Atlantique (excepté Rockwall) situé à 40 nautiques de la côte Ouest des Îles Hébrides.
De par son isolement, les restes de cet ancien volcan effondré et submergé, sont devenus le refuge de centaines de milliers d’oiseaux qui y nichent. L’homme en des temps reculés y a vécu dans des conditions difficiles et des traces de son occupation sur plusieurs millénaires y sont visibles.
La position avancée dans l’Atlantique met l’environnement marin à l’abri des pollutions côtières habituelles. De plus, les difficultés d’accès dus aux conditions climatiques qu’il faut gérer sans faute dans ces endroits le mettent à l’abri des nuisances que provoque systématiquement la plaisance nautique partout où elle se développe.
L’endroit a été acquis par le National Trust of Scotland en 1957. C’est un organisme à but non lucratif de 365.000 membres qui travaille à la préservation des patrimoines naturel et culturel Ecossais. Le NTS gère et administre l’archipel de St Kilda.
La mer autour de l’archipel est une Aire Spéciale Protégée (Special Protected Area) fonctionnant sur les fondements de la loi Ecossaise à travers les Wildlife and Country side act de 1981 et le Nature and Conservation act de 2004.
La totalité de l’archipel de St Kilda est aussi protégé par le Scottish Natural Heritage qui a reçu mandat du National Trust of Scotland. C’est un des 15 sites classé : Site of Special Scientific Interest pour à la fois ses : faune, flore, paysage, géologie et géo morphisme
C’est aussi une Aire Marine Protégée ( Marine Protected Area) aux termes du Marine and Coastal access act 2009 du Royaume Uni. Sa fonction est de protéger faune, flore, habitats. En 6 ans le nombre de ces MPAs a doublé en Ecosse et leur superficie atteint maintenant 22% de la surface marine totale.
Le gouvernement Ecossais, au travers du National Scenic areas protège également les paysages de l’archipel qui fait partie des Western isles avec Harris, North et South Uist.
Une riche biodiversité terrestre, marine et sous-marine
St Kilda est l’un des sites de nidification les plus importants de l’Atlantique. Plusieurs espèces y sont surveillées et bénéficient d’une protection de par la loi. Ce sont entre autres le Fou de Bassan, le Macareux, le Guillemot de Troïl, le Fulmar Boréal, le Grand Labbe. Se déplacer sur le site est l’assurance de faire le plein de photos !
Les eaux autour de St Kilda sont particulièrement cristallines et la plongée sous-marine pour y découvrir une biodiversité exceptionnelle est envisageable avec autorisation.
Malgré la rigueur du climat, la présence de sel apporté par les embruns et la pauvreté du sol, on y dénombre pas moins de 174 plantes à fleurs. Un chiffre important, mais bien inférieur aux 600 plantes inventoriées dans les îles Hébrides voisines ou aux 2000 espèces du continent.
Le NTS finance la présence d’un archéologue qui continue à fouiller méticuleusement les lieux. Par ailleurs, l’île accueille en permanence des scientifiques qui viennent travailler sur la faune, la flore, le climat, le mouton de Soay et la vie marine.
Des volontaires peuvent séjourner à St Kilda pour contribuer à la restauration ou à la maintenance des lieux. Ils sont alors logés et nourris. C’est une expérience unique.
Des bateaux peuvent mouiller sur fond de sable dans une hauteur d’eau raisonnable à Village Bay. Une autorisation est néanmoins nécessaire et se demande à l’avance.
Randonnée sur un site naturel et historique inscrit au patrimoine mondial à l’UNESCO
Pas moins de mille sept cent cinquante personnes posent le pied chaque année sur l’île de Hirta, débarqués par les bateaux de Kilda Cruises. Chaque arrivant est accueilli par le gestionnaire des lieux qui présente St Kilda lors d’un court briefing. Des conseils sur le comportement respectueux à adopter pendant la visite sont prodigués avec quelques mises en garde, notamment sur la circulation le long des falaises. L’endroit n’est pas très vaste, mais les plus sportifs ont la possibilité de parcourir quelques kilomètres et plusieurs centaines de mètres de dénivelé en peu de temps. Le sommet de l’île culmine à quatre cent trente mètres.
Hirta une histoire qui interpelle
Il est recommandé de démarrer la randonnée par l’ancien village construit en 1830 où se trouve le musée bien documenté. Il ne faut pas omettre sa visite pour une meilleure compréhension du site et de son histoire.
Derrière le village, les abris en pierre utilisés aujourd’hui par les moutons rappellent les anciennes maisons de Hirta avec leurs murs en pierres de plus d’un mètre d’épaisseur et leur toiture constituée de pierres plates surmontées de végétal. La ventilation naturelle à travers les murs permettait d’évacuer l’humidité ambiante et les masses et densité des pierres assuraient un minimum de confort thermique grâce à l’accumulation du rayonnement lumineux. Confort tout relatif lorsqu’une tempête balayait les lieux avec des vents s’élevant à plus de deux cents kilomètres-heure !
Immersion dans une nature admirablement préservée
La direction du col est vivement recommandée. Situé au Nord Est du village, on y accède par un petit sentier escarpé qui conduit vers Conachair, le sommet de l’île culminant à 430 mètres. On arrive dans un premier temps au bord d’une falaise d’où la vue vers l’île de Boreray et de ses Stacs , Lee et Armin, est somptueuse.
En poursuivant le sentier qui longe cette falaise, la plus haute du Royaume-Uni, le randonneur est accompagné par un véritable ballet d’oiseaux qui jouent avec les courants ascendants : Fulmars, Fous de Bassan et Skuas assurent le spectacle. Certains oiseaux rendent visite aux visiteurs et les approchent parfois de très près par curiosité. Soyez vigilants si vous apercevez un nid, car ils n’hésiteront pas à vous charger par réflexe d’autodéfense.
Les rencontres avec les moutons de Soay font partie de la balade. Il faut savoir qu’il s’agit de l’une des espèces les plus proches génétiquement de celles vivant à l’époque de la préhistoire !
L’île de Boreray : des découvertes archéologiques stupéfiantes
Les découvertes archéologiques effectuées en 2011 sur l’île de Boreray justifient un peu plus, si besoin en était, l’inscription du site de St Kilda au Patrimoine Mondial de l’Humanité à l’UNESCO.
Depuis les fouilles archéologiques, on savait que Hirta, l’île principale de l’archipel de St Kilda, avait été fréquentée il y a quatre à cinq mille ans avant que l’occupation ne devienne permanente. Malgré les conditions de vie rigoureuses imposées par les éléments, les habitants demeurèrent sur ce bout de terre jusqu’à l’évacuation qui fût décrétée en 1930 pour des raisons administratives.
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Les oiseaux de mer : une ressource importante pour l’homme
Si les populations qui se sont succédées ont pu survivre, c’est uniquement grâce à la ressource apportée par les oiseaux. En effet, leurs œufs et leur viande ont de tout temps constitué la base de l’alimentation. La pauvreté et le peu de superficies des terres, les difficultés d’accès à la ressource halieutique, le peu de marnage des marées qui ne génère pas la formation d’un estran suffisamment étendu pour y collecter les crustacés, ont provoqué ce comportement alimentaire très particulier. On ne trouve aucune trace de ce type de comportement sur d’autres îles de notre planète.
Les îlots proches de Boreray et les deux Stacs qui le jouxtent abritent des dizaines de milliers d’oiseaux. On peut imaginer que les habitants de St Kilda s’y rendaient, quand les conditions météo étaient favorables, pour ramasser des œufs et capturer des oiseaux. Néanmoins, on n’aurait jamais pu concevoir que des habitants puissent élire domicile sur des îlots aussi inhospitaliers à l’âge du fer ! Un endroit où il est difficile de trouver un mètre carré de terre horizontale et où les quelques surfaces herbeuses se trouvent sur des pentes vertigineuses qui risquent à tout moment de vous précipiter quelques dizaines de mètres plus bas…
Des capacités d’adaptation de l’homme insoupçonnées
Aussi, la stupéfaction a été générale quand on apprit que les chercheurs envoyés par la Royal Commission on the Ancient Historical Monuments of Scotland (RCAHMS) et le National Trust for Scotland (NTS) avaient découvert les traces d’un habitat de pierre dissimulé dans le sol de Boreray qui pourrait remonter à l’âge … du fer! Outre quelques objets usuels, les archéologues ont mis en évidence que ces pentes abruptes étaient aménagées en terrasses pour y permettre la culture de céréales. L’analyse des graines récoltées sur place le confirme. Les raisons d’une implantation à pareil endroit sont tout simplement hallucinantes mais elles en disent long sur les capacités d’adaptation de l’humain.
Pour Ian Parker, l’un des responsables du RCAHMS pour cette mission, « C’est une découverte très significative et cela pourrait changer notre compréhension de l’histoire de St Kilda. Cette nouvelle découverte démontre qu’une communauté d’agriculteurs vivait sur Boreray à une époque qui pourrait remonter à la préhistoire. Les traces d’agriculture et d’habitat nous donnent une idée du mode de vie de ces premiers habitants. Cultiver dans cet endroit qui est surement l’un des plus isolés et inhospitaliers de tout l’Atlantique Nord a dû être une activité éreintante et harassante. Compte tenu des pentes abruptes et impraticables de l’île, il est ahurissant d’imaginer qu’ils aient même envisagé de vivre là ».
Les moutons sauvages millénaires de Soay
Impossible de ne pas croiser un mouton de Soay durant votre randonnée sur l’île de Hirta. Singuliers, ces moutons dotés de solides cornes et arborant une toison tantôt marron foncé, tantôt plus claire, ressemblent un peu aux mouflons de Corse ou des Alpes du Sud. Cette espèce de mouton se distingue aussi par sa panse de couleur claire qui caractérise les moutons sauvages.
Des animaux présents depuis l’âge de bronze
Soay est un petit îlot situé à quelques encablures de Hirta. Son accès est périlleux et ne peut s’entreprendre que par mer très calme. À cause de ses pentes abruptes et de sa végétation rase, les moutons ne peuvent y cohabiter en nombre. L’homme semble n’y avoir jamais habité, contrairement à Hirta ou Bororay et aucun prédateur du mouton n’y a jamais existé.
Les moutons de Soay seraient parqués là depuis une époque qui pourrait correspondre à celle de la domestication du mouton, soit l’âge du bronze. Durant cette période, les moutons appartenaient aux seigneurs des îles Hébrides et non aux habitants de Hirta qui étaient seulement autorisés à ramasser la laine tombée au sol et à prélever un mouton de temps à autre pour améliorer le quotidien.
En 1932, après l’évacuation des habitants de l’île d’Hirta, une centaine de moutons a été transférée depuis l’îlot de Soay. L’homme n’a donc à priori jamais interféré dans l’évolution de cette race et quand vous croisez des moutons, il faut réaliser qu’il s’agit des mêmes bêtes qui fréquentaient les lieux il y a plus de trois mille ans !
Une capacité d’adaptation exemplaire à l’évolution climatique
Ces moutons sont très surveillés par les scientifiques qui ont relevé leurs caractéristiques physiques et ont réalisé des analyses d’ADN sur plus de 8500 animaux. Suite aux résultats; si la population semble globalement augmenter, la taille moyenne du mouton semble diminuer. D’après Ana Bento, scientifique du Département de Biologie à l’Imperial College de Silwood Park, et d’Alastair Wilson, chercheur de l’Institut d’Évolution Biologique de l’Université d’Edimburgh, ces variations morphologiques pourraient provenir de l’évolution des conditions environnementales locales.
Le climat et ses variations de température semblent jouer un rôle important dans la modification de la thermorégulation du mouton. Ces paramètres modifient localement le développement de la flore dont le mouton de Soay profite sans contrainte au moins six mois de l’année. Par ailleurs, les contraintes alimentaires se sont assouplies durant la période hivernale favorisant les conditions de reproduction qui ont lieu à ce moment là. Il est néanmoins trop tôt pour tirer des conclusions définitives sur ces modifications environnementales et comportementales.
Compte tenu des conditions de vie particulières à cet endroit, il est intéressant de relever la capacité d’adaptation du mouton de Soay à l’évolution du climat et de l’environnement naturel.