La France a prévu d’encadrer le processus complexe de protection de l’utilisation de sa biodiversité extrêmement riche et prisée des chercheurs, en mettant en application, à travers sa loi sur la biodiversité, le protocole de Nagoya. Ce traité international, élaboré dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique de 1992, est entré en vigueur en octobre 2014.
En province Sud par exemple, les chercheurs doivent s’assurer du double consentement de l’autorité souveraine (en l’occurrence la province) et du propriétaire foncier avant de récolter sur leurs terres. Un contrat modèle prévoit une obligation de partage des bénéfices à hauteur de 2% des ventes de produits issus des plantes collectées. C’est ce que doit signer, par exemple, le laboratoire des plantes médicinales, une antenne de l’Institut de chimie des substances naturelles (ICSN) du CNRS, avant de pouvoir faire des prélèvements dans la flore de ce territoire. Condition sine qua non pour que l’institut maintienne son antenne calédonienne, précieuse source d’extraits végétaux : « Depuis son ouverture en 1976, elle alimente près du tiers de la collection d’extraits de l’ICSN. En ce moment, nos recherches se concentrent surtout sur des plantes aux propriétés anticancéreuses, antiparasitaires et antivirales : dengue, chikungunya, HIV… »
Enquêtes ethnobotaniques auprès des Kanak
Si le laboratoire du CNRS récolte toutes sortes de plantes endémiques, celui de l’UNC revendique une tout autre méthode : des enquêtes ethnobotaniques sur la médecine traditionnelle kanak orientent leurs recherches. « L’avantage de partir de ces savoirs, c’est qu’ils nous renseignent sur le fait que la plante a bien une activité sur l’homme, et qu’elle n’est pas toxique. On la teste ensuite en laboratoire sur plusieurs cibles, sans se cantonner à l’usage traditionnel », explique le chercheur Edouard Hnawia.
En revanche, les savoirs traditionnels – un volet majeur du protocole de Nagoya – ne sont pas encore protégés en Nouvelle-Calédonie. Ils font l’objet d’un projet de loi du pays, actuellement en suspens. « Ces savoirs sur les plantes, détenus par le peuple autochtone kanak, ont la particularité d’être collectifs et inaliénables, explique Régis Lafargue, conseiller à la cour d’appel de Nouméa, qui a rédigé le projet de loi au Congrès local. Ils sont la propriété intellectuelle d’un clan, qui est identifié comme gardien d’une plante et de ses secrets. » Le magistrat prône la création d’une autorité indépendante qui répertorierait ces connaissances, afin de prouver, en cas de dépôt de brevet, leur antériorité.