Une référence pour les plongeurs professionnels
Son succès, le Centre International de Plongée des Glénan (CIP) le doit autant à la richesse exceptionnelle des fonds marins qu’à l’avant-gardisme de la pédagogie développée par l’un de ses fondateurs, Roger Weigèle, instructeur de plongée et acrobate lutteur à ses heures. La réflexion collective et le savoir-être aquatique sont au cœur de cette pédagogie qui demeure attachée aux préceptes de la fédération française de plongée sous-marine, mais qui propose des évolutions novatrices, telles que les réunions régulières entre moniteurs pour suivre l’évolution des élèves ou les groupes de travail dans l’eau limités à 2 ou 3 élèves pour favoriser leur progression. Une attention particulière est donnée pour optimiser l’aquacité des élèves…
«L’esprit CIP» reconnu dans le monde entier
Pionnier dans l’âme, le CIP propose, peu de temps après sa création, des formations plus spécifiques comme des formations de trimix, des stages d’initiation pour handicapés physiques, de plongée historique sous-marine, ou encore de biologie subaquatique. Bientôt, des moniteurs européens font le déplacement jusqu’aux Glénan pour expérimenter «l’esprit CIP» devenu une référence et dont certains plongeurs ont même intégré la fameuse équipe du commandant Cousteau. Encore aujourd’hui, des photographes et vidéastes sous-marins de renom, tel Claude Rives ou Didier Noirot, ainsi que de nombreux moniteurs fédéraux, continuent de transmettre les valeurs acquises dans les fonds émeraudes de l’archipel.
Une organisation adaptée au milieu insulaire
Le centre loge ses plongeurs dans des dortoirs au sein d’une ancienne ferme et dans de grandes tentes dressées pour la saison. Le matériel de plongée et les compresseurs sont entreposés dans une partie de la ferme. Situé à deux pas de la cale, un bâtiment appartenant au Conseil général du Finistère, sert de lieu de vie aux stagiaires. Un bateau en aluminium, le « Pierre-Marie » et un ancien chalutier, le « Corto des Glénan », ravitaillent les stagiaires et les emmènent pendant toute la saison sur les sites de plongée.
Pionnier en matière de développement durable
Côté environnement, le CIP n’a pas changé de positionnement depuis 50 ans : même organisation et même soucis d’économie d’eau et d’électricité qui est fournie à 30% par l’éolien, le reste étant produit par un groupe électrogène. «Cela fait presque 50 ans que nous sommes installés sur ce site extraordinaire. Nous sommes conscients de notre chance et nous faisons le maximum pour contribuer à préserver l’archipel» explique Laurent Cayatte, instructeur régional et directeur de la structure depuis 1985, entouré de son épouse, de 3 autres salariés et des nombreux bénévoles qui se relaient pendant la saison.
Le CIP accueille chaque année près de 1200 stagiaires, ce qui correspond à plus de 6 000 plongées, et délivre environ 150 brevets de plongée dont 35 à 40 monitorats fédéraux. Au total, 70% de l’activité du centre provient de la formation.
D’après le dirigeant, le CIP vise plus à investir au niveau de l’amélioration des infrastructures que d’accueillir un plus grand nombre de stagiaires. «Nous avons plusieurs projets en vue comme l’acquisition d’un compresseur électrique, la construction d’un émissaire d’eau pluviale ainsi que de nouveaux logements, et selon les subventions accordées, nous souhaiterions transformer la ferme en écomusée afin d’informer les visiteurs sur le caractère exceptionnel de l’archipel et de partager les merveilles que nous observons sous l’eau» précise le directeur, le regard rêveur.
Des fonds marins préservés et foisonnants
Situe à l’extrémité d’une ligne continue de hauts-fonds allant jusqu’à l’île de Groix, l’archipel est constitué de roches cristallines (granites à deux micas) érodées qui prennent de multiples formes arrondies. L’archipel est réputé pour la limpidité de ses eaux grâce à la forte présence de maërl ainsi qu’aux eaux du large, qui entrent dans la baie de Concarneau en longeant les îles et restent ainsi à l’écart des rejets urbains ou industriels.
Les deux tiers de l’archipel sont interdits à la chasse sous-marine. Une mesure qui semble faire ses preuves d’après l’équipe de moniteurs du CIP qui a pu constater la présence de plus de poissons adultes ces dernières années. «On peut observer par exemple beaucoup plus de grosses vieilles qu’avant sur certains sites» confirme Laurent Cayatte qui regrette néanmoins que la pêche au filet soit encore autorisée.
Herbiers de zostères et bancs de maërl
L’archipel se distingue par deux peuplements d’intérêt patrimonial que l’on trouve sur les fonds meubles. Les herbiers de zostères des Glénan représentent l’un des trois sites majeurs de Zostera marin en Bretagne, tandis que les bancs de maërl, constitués par des concrétions d’algues rouges calcaires (Lithothamnion corallioides, Phymatholithon calcareum) constituent l’un des habitats marins les plus riches sur le plan de la biodiversité. Tous deux jouent un rôle essentiel en tant que site de reproduction, de nourrissage et d’abri pour de nombreuses espèces. Les bancs de maërl ressemblent à de grands champs sous-marins où vivent près de 800 espèces animales et plus de 100 espèces d’algues, broutés par de nombreux amphipodes et des gastéropodes herbivores, qui, par leur activité biologique, alimentent le monde des détritivores (petits crustacés et vers marins). Les plongées dans l’archipel sont réputées pour leur vie foisonnante et les plongeurs y croisent de nombreuses espèces de poissons et de crustacés : bars, congres, raies torpilles, homards, soles, rougets, cigales, Saint-pierre, balistes, grondins, poulpes, baudroies et roussettes… En cherchant un peu dans les roches et en évitant de retourner les cailloux, ils peuvent dénicher des étrilles, tourteaux, galathées, targeurs, blennies, gobies, tripterygions, ormeaux…
La grande diversité des fonds de l’archipel constitués de plateaux et de tombants et la richesse au niveau de la flore et faune sous-marines attirent les plongeurs accros à la «bio». Les sites de plongée sont bien répartis sur l’ensemble de l’archipel et il y a toujours une possibilité de plonger quelles que soient les conditions météo.
Des fonds marins riches et diversifiés
Laon Egen Hir, la plongée phare des Glénan
Situé au Sud-Est de l’archipel, Laon Egen Hir est l’une des plongées phares de l’archipel. Entre 0 et 18 mètres émerge un groupe de roches où les plongeurs peuvent découvrir une succession de grottes recouvertes de corynactis, ses magnifiques anémones bijoux multicolores. C’est un vrai bonheur que de s’engouffrer dans les multiples failles, entre algues et éponges cliones pour y rencontrer toute la faune classique de l’archipel. On y trouve de nombreuses espèces qui y vivent ou qui y transitent telles que des araignées, des cigales de mer, des raies torpilles et des rougets et parfois même des poulpes ou des Saint-Pierre.
Les Bluiniers ou marmites de sorcières
Autre site incontournable pour les plongeurs initiés, le Pic Jules Bonnot, encore appelé « Les Bluiniers », est un plateau qui se trouve entre 20 et 40 mètres de profondeur à l’ouest de l’archipel. Les plongeurs y découvrent une curiosité biologique unique baptisée « marmites de sorcière », sorte de trous cylindriques de 1 à 3 mètres formés par la rotation d’un caillou, à l’époque lointaine où le lit de la rivière de l’Odet coulait à cet endroit. Il est fréquent d’observer des araignées et des tourteaux pris au piège dans ces grandes marmites dont ils ne parviennent pas à escalader les parois trop lisses et incurvées. Les plongeurs apprécient particulièrement le décor minéral de ce site où ils peuvent admirer congres, coquettes, nudibranches, bonellies, corynactis, axinelles, plumes d’or, et des alcyons jaunes, blancs et rouges.
Explorer les épaves des Glénan
De nombreuses épaves sont présentes dans l’archipel et passionnent les adeptes de l’archéologie sous-marine et les amateurs d’histoire sous-marine. L’Epave Pietro Orseolo est l’une des plus réputées. Ce cargo italien de 142 mètres de long pour 18 mètres de large fut réquisitionné pendant la 2nde Guerre Mondiale par les Allemands qui le chargèrent de vivres, d’armes et d’outils à destination du Japon. Cible prioritaire d’une escadrille de 20 avions anglais de la RAF, le bateau resta à flot dans le chenal de Concarneau avant d’être coulé à un mille au Nord de l’île de Penfret en 1943. L’histoire raconte que la nuit venue, des plongeurs résistants seraient parvenus à ouvrir la coque pour récupérer des marchandises. Aujourd’hui, l’épave repose en paix dans l’archipel et est indiquée par une bouée en surface. Posée sur un fond de sable vaseux entre 17 et 30 mètres, l’épave est légèrement inclinée sur tribord. L’orientation sur l’épave n’est pas évidente, d’autant que les cales ont été détruites et les parties hautes arasées. Il est donc conseillé de bien maitriser les informations de base avant de la visiter. La proue, située au Nord-Ouest, a basculé sur tribord. L’arbre d’hélice décoré de gorgones est un guide précieux pour aller et revenir de l’arrière où reste un imposant gouvernail. Inutile de chercher l’hélice car elle n’existe plus. En revanche, na manquez pas les 3 camions autochenilles situés sur la partie avant. Des câbles tendus à 20 mètres de profondeur servent de fil d’Ariane pour rejoindre l’avant et l’arrière du bateau depuis la partie centrale qui comprend un énorme moteur méconnaissable. L’épave est habitée par des lieus, bars, vieilles, blennies, congres et sert de HLM aux tourteaux ! Un impressionnant banc de tacauds tournoie autour de l’épave et accompagne les visiteurs pendant toute la plongée. Variable, la visibilité peut être limitée comme excellente.
D’autres épaves reposent dans l’archipel comme l’Arab (ex Jean Bart), corvette de 35 mètres, perdue en 1796 ; il n’en reste plus que quelques canons, l’ancre et des morceaux de cuivre et de plomb. Le Mustang et l’Ellé, deux vapeurs situés entre 5 et 15 m, pour le premier et entre 10 et 20 m pour le second, ou encore l’Alja, un cargo hollandais de 43 m perdu en 1940. Cette épave se trouve à -38 mètres sur un fond de sable. La proue est retournée et habitée par quelques congres.