L’Ile de N’guna au Vanuatu
Pour vous rendre à N’Guna, vous devez rejoindre le quai situé tout au nord d’Efate à Emua où un passeur vous transportera en bateau vers l’île. En une vingtaine de minutes, après avoir quelque peu slalommé au milieu des patates de corail et apprécié toutes les nuances de bleu que la mer peut offrir, vous accostez sur une plage de sable qui borde le village de Woralapa.
L’île est dominée par un volcan dont les pentes descendent rapidement vers la mer. Une forêt dense habille la grande majorité du relief. Une petite bande de sable blanc ceinture toute l’île. Sur l’ouest, en partie sous le vent, où se trouve le village, le lagon n’est profond que de quelques mètres sur une largeur d’environ deux cents mètres ce qui permet de fabuleuses promenades avec palmes masque et tuba. La faune est en nombre et il est possible d’y croiser quelques gros poissons prédateurs en maraude.
Une petite structure d’accueil pour séjourner sur l’île
Si vous souhaitez résider quelques jours sur l’île, c’est possible. le confort est sommaire. Il n’y a ni eau courante ni électricité. Néanmoins vous serez au calme, en bord de mer avec une plage pour vous seul et en bonne compagnie.
Vous organiserez votre séjour en partenariat avec une ou deux personnes qui seront en charge de vous faire visiter l’île. Vous parcourerez le bush et traverserez la forêt sur les pentes escarpés de l’ancien volcan pour atteindre le sommet où une vue imprenable sur Efate et les îles avoisinnantes vous récompensera de vos efforts. En cours de route vous aurez appris beaucoup sur la petite agriculture locale et ses techniques de production.
Vous découvrirez ce qu’est une économie de subsistance. Vous traversez de minuscules parcelles de terrain dans lesquels ont été plantés, après brûlis, ignames, patates douces, bananiers, ananas, papayers, etc… Ces parcelles seront abandonnées après deux ans puis, un peu plus loin, d’autres lopins de terre seront défrichés et complantés à leur tour. Les anciens plans et arbres continueront à donner leurs fruits jusqu’à ce que la jungle prenne le dessus. On vous montrera également différentes plantes médicinales en vous expliquant leurs vertus, leur utilisation est ici ancestrale.
Plusieurs pêcheurs sortent régulièrement en mer. La plus part le font en pirogue. Ce n’est peut-être pas la meilleure option car vous ne posséderez aucun élément de sécurité. Un des pêcheurs effectue ses déplacements en bateau à moteur, c’est envisageable de l’accompagner.
Il existe plusieurs bars à kava dans le village. Le kava est la boisson traditionnelle obtenue par macération d’une racine broyée puis mise à macérer dans de l’eau. Traditionnellement la racine de kava était mâchée et non broyée mécaniquement. Cette faon de faire est en train de disparaître, il est conseillé de ne pas boire de boisson ainsi préparée car c’est un vecteur de transmission de l’hépatite. La boisson a un effet appaisant mais n’est pas une drogue. Des bars très vétustes ouvrent le soir, vous y serez invités, vous pouvez accepter mais personne ne s’offusquera de votre refus.
Nous vous conseillons, si vous souhaitez prendre des photos pendant votre séjour de bien préciser vos intentions dès que vous mettrez le pied sur l’île. En demandant l’autorisation et en indiquant la raison pour laquelle vous souhaitez photographier, vous vous affranchirez de négociations permanentes et fastidieuses à chaque prise de vue et d’un possible dérapage dans certaines circonstances.
Des aires marines protégées intégrées dans le quotidien des insulaires
Le nombre de réserves permanentes et temporaires est en augmentation dans les îles du Pacifique Sud aux fins de protéger la biodiversité menacée. Pour différentes raisons sociales culturelles ou de conservation des espèces, de nombreuses communautés insulaires se montrent favorables à leur création.
Plusieurs Aires Marines Protégées existent sur N’Guna et sur les petites îles de Pele et Emao très proches sur le plan géographique, social et culturel. Pour information de 1998 à 2008 18 Aires Marines Protégées supplémentaires ont été crées sur ce petit archipel! Elles sont parfois très peu étendues mais lorsqu’on pose la question aux villageois il est très difficile de connaître leur limite en direction du large. Elles débordent largement le niveau des tombants, les zones de grands fonds sont donc concernées.
Vous percevrez immédiatement l’importance que la présence de ces Aires protégées représente pour la population des villages car elles deviendront très vite l’objet de discussions avec les villageois. Par exemple, lors de la mise en mains de votre bungalow on vous indiquera l’endroit le plus adéquate pour pratiquer le snorkeling et on vous délimitera le périmètre d’une réserve marine pour que vous puissiez voir flore et faune dans des conditions optimales. Si vous posez quelques questions, vous comprendrez que cette organisation a des fondements solides et qu’elle est respectée de tous. Vous constaterez que la mise en place d’une activité touristique devient un atout supplémentaire quant à la motivation dont les locaux font preuve pour établir des réserves.
D’après Christopher Y Bartlett de l’Université Australienne James Cook, il s’avère qu’un travail considérable a été entrepris sur ce petit archipel de N’Guna, Pele, Emao. Un suivi a été effectué dans les réserves temporaires et permanentes de ces îles. Suite à l’analyse des 55 questions, établies suivant un protocole de Christopher Y Bartlett et posées à 80 % de la population adulte de six communautés impliquées dans la gestion d’aires marines protégées, on put comparer les résultats concernant la perception qu’ont les populations quant à la bonne santé des populations de poissons de récifs, de Trochus Hiloticus, de Bénitiers (Tridacnids) et de Coraux, vivants à l’intérieur et à l’extérieur des réserves.
Il existe en effet, localement, deux types de réserves comme dans de nombreuses îles du Pacifique: les réserves permanentes où la pêche est interdite totalement et ce de façon définitive ou sur de longues périodes et des réserves temporaires ou un prélèvement de la ressource est effectué une à deux fois par an au maximum et ce pendant une courte période, une journée en général. Cette dernière mesure n’est pas totalement compatible avec les instructions planétaires que peuvent donner d’importants organismes comme l’IUCN mais elle a le mérite de tenir compte des désideratas locaux et de bien fonctionner. Il est à noter que le prélèvement ponctuel est une tradition dans les îles du Pacifique pour des raisons sociales: organisation d’une cérémonie par exemple, ou pour des raisons économiques. On pourra d’ailleurs découvrir des techniques de pêche originales comme la pêche aux cailloux en Polynésie qui illustre cette pratique.
Une analyse très fine des résultats du questionnaire permit de conclure que 80% des villageois avaient conscience du bien fondé de la mise en place de réserves car ils avaient conscience du changement du paysage sous marin. Ceci fut vérifié méthodiquement grâce aux plongeurs sous-marins du moins en ce qui concerne le corail et les mollusques dont le déplacement est nul ou difficile. Il fut constaté que 90% et 98% supportaient respectivement les réserves temporaires et permanentes.
Dans le monde Mélanésien c’est traditionnellement un droit pour la collectivité que de pouvoir accéder aux ressources terrestres et marine. Par ailleurs indépendamment des autorités locales qui aident à la mise en place des Aire Marines, les autorités coutumières des villages désignent un collectif chargé de la gestion de la ressource. Il n’y a que très peu de contrevenants aux décisions qui sont prises. Les choix décidés sont communiqués aux villages voisins de façon à harmoniser les pratiques de pêche et éviter que les pêcheurs prélèvent dans les réserves des uns et des autres. Ceci favorise d’une part les échanges sociaux entre les villages des îles et permet d’élaborer un programme de gestion favorisant une pêche durable et cohérente de la ressource. Des amendes aux contrevenants sont appliquées, elles deviennent importantes pour des éléments extérieurs comme des pêcheurs professionnels d’autres îles qui seraient surpris sur les zones protégées.
Il pourra vous être également proposer d’aller la nuit tagger les tortues. Il est à noter que les chefs de village de l’archipel ont instauré spontanément un moratoire sur le prélèvement des tortues pour une période minimale de 10 ans après qu’une politique de sensibilisation eut été mise en place avec entre autres la collaboration de la Wan Smolbag Theatre Company qui eut l’excellente idée de créer une pièce de théâtre sur le thème de la protection des tortues. Elle alla jouer dans tous lesvillages d’Efate. Une discussion sur le thème de la prévention et de la protection fut organisée après chaque représentation. Le résultat fut immédiat et positif. Cette remise en question d’activités traditionnelles et ces initiatives à saluer vous permettront ainsi de croiser assez facilement des tortues lors de vos snorkelings ou promenades en bateau.