Entre dĂ©veloppement du tourisme et prĂ©servation de lâenvironnement
MalgrĂ© sa taille modeste â 7 km de long pour 3 km de large â Porquerolles est lâun des sites touristiques les plus prisĂ©s de la CĂŽte dâAzur. DĂšs le dĂ©but de la saison estivale, alors que les cigales se mettent Ă chanter, lâĂźle change radicalement de visage. Le nombre de ses habitants se multiplie par 150, passant de 130 Ă 20 000 personnes par jour ! Au final, plus dâun million de visiteurs sĂ©journent sur lâĂźle chaque annĂ©e. Outre lâattrait, des paysages de lâĂźle, sa proximitĂ© avec le continent et son relief accessible expliquent en partie cet incroyable succĂšs.
Lâimpact de la sur frĂ©quentation
Un succĂšs relatif puisque cette arrivĂ©e massive de touristes entraĂźne toute une sĂ©rie de problĂšmes de surpopulation du village, dâapprovisionnement en eau et de traitement des dĂ©chets… AprĂšs sâĂȘtre rĂ©gĂ©nĂ©rĂ© durant lâhiver, lâenvironnement subit de plein fouet la pression anthropique estivale. Quand on sait que lâĂźle peut accueillir jusquâĂ 1300 bateaux simultanĂ©ment durant la saison estivale, que la plupart des plaisanciers ne sont pas Ă©quipĂ©s pour gĂ©rer les rejets en mer, et que les plages bondĂ©es sont insuffisamment Ă©quipĂ©es de sanitaires, lâimpact sur le milieu marin nâest pas insignifiant, sans compter les risques sur la santĂ©… Par ailleurs, si la station dâĂ©puration fonctionne sans aucun traitement chimique et que les eaux usĂ©es sont recyclĂ©es par systĂšme de lagunage et rĂ©utilisĂ©es pour lâarrosage des vergers, la structure nâest adaptĂ©e que pour 4500 habitants par jour… Quant Ă la consommation dâeau, elle passe de 80 m3 par jour lâhiver Ă 650 m3 en Ă©tĂ©, soit 400 000 litres dâeau acheminĂ©e chaque jour entre avril et octobre par bateau-citerne pour complĂ©ter les prĂ©lĂšvements sur les rĂ©serves des nappes souterraines.
Porquerolles classĂ©e en « cĆur de parc »
Afin de mieux protĂ©ger lâĂźle, un plan tournĂ© vers le dĂ©veloppement durable a Ă©tĂ© mis en place afin de faire cohabiter les activitĂ©s humaines et la nature encore prĂ©servĂ©e de lâĂźle. La vocation de lâextension de Porquerolles en cĆur de parc, entĂ©rinĂ©e depuis avril 2012, est avant tout de protĂ©ger lâespace naturel, en accord avec un amĂ©nagement et une restauration durables de lâĂźle, et de pouvoir mieux accueillir les touristes. Pas question pour autant de mettre lâĂźle sous cloche et dâen fermer lâaccĂšs aux publiques. « Les Porquerollais craignent que la mise en rĂ©serve vide lâĂźle de ses habitants comme cela a Ă©tĂ© le cas Ă Port-Cros oĂč il ne reste plus que 18 habitants permanents sur 300 avant le parc national. » Pour Serge Moreau, il faut trouver un compromis entre lâhomme et la nature et faire participer les locaux au dĂ©veloppement durable de lâĂźle. Telle est lâambition de lâextension du Parc de Port-Cros Ă Porquerolles qui assure une plus grande place pour les collectivitĂ©s locales et les usagers au sein du conseil dâadministration. « Les solutions existent, Ă commencer par lâextension de la saison touristique tout au long de lâannĂ©e et la promotion de lâĂźle en dehors de la haute saison pour les sĂ©minaires, les scolaires ou autres… Il faut que les mentalitĂ©s changent » martĂšle le chef de secteur du parc qui a Ă©tĂ© en charge de la dĂ©licate mission de prĂ©parer le statut de Porquerolles en cĆur de parc. Si les agents ont multipliĂ© les concertations avec les habitants, les commerçants, les prestataires et les transporteurs, ils ont malgrĂ© tout dĂ» faire face Ă quelques dĂ©gĂąts de matĂ©riel (Zodiacs et pneus de voitures crevĂ©s…). Mais Serge Moreau reste positif. Fort dâune carriĂšre bien remplie au sein des parcs nationaux de France, il a connu des cas similaires et demeure confiant pour lâavenir de Porquerolles que « ses habitants sauront prĂ©server intelligemment en collaboration avec le Parc national ».
Des agents polyvalents sur tous les fronts
Depuis plus de 40 ans, lâĂ©quipe du Parc national veille Ă lâĂ©panouissement de la flore et faune sauvage de Porquerolles. PrĂ©sents sur le terrain 7 jours sur 7, les 15 agents du parc se relaient sur tous les fronts. Polyvalents, ils sâoccupent de la rĂ©habilitation du patrimoine bĂąti, de lâentretien des forĂȘts ou des pistes, comme de lâamĂ©nagement des collections agricoles ou des actions pĂ©dagogiques pour recevoir des classes de dĂ©couvertes.
La prioritĂ© : limiter les risques dâincendie
En relation avec des scientifiques, ils rĂ©alisent des Ă©tudes, inventaires et suivis des Ă©cosystĂšmes et de diverses espĂšces endĂ©miques et/ou menacĂ©es. Les campagnes dâĂ©radication de plantes envahissantes telle que les griffes de sorciĂšres ou lâherbe de la pampa font Ă©galement partie de la mission de prĂ©servation des agents. « La prĂ©vention contre lâincendie est notre prĂ©occupation principale » prĂ©cise Serge Moreau, chef de secteur de Porquerolles depuis plus de trois ans. « Un plan de dĂ©fense de la forĂȘt a Ă©tĂ© Ă©laborĂ© afin de diminuer les risques qui sont particuliĂšrement prĂ©occupants durant la saison estivale, quand la sĂ©cheresse et le vent sont associĂ©s Ă la forte frĂ©quentation touristique ».
Sensibiliser plutĂŽt que dâinterdire
Les agents veillent Ă©galement au respect de la rĂ©glementation en vigueur qui interdit le camping, le bivouac et les feux sur toute lâĂźle. De mĂȘme, il est interdit de fumer en dehors du village et, lâĂ©tĂ©, par fort vent, seul lâaccĂšs aux plages est autorisĂ©. Agents techniques assermentĂ©s, les gardiens de lâenvironnement jouent Ă©galement un rĂŽle de police sur lâĂźle et sont aptes Ă verbaliser en cas dâinfraction Ă la rĂ©glementation. « PlutĂŽt que de jouer un rĂŽle rĂ©pressif, nous privilĂ©gions lâinformation et la sensibilisation du grand public », explique Serge Moreau avec insistance. « Loin de vouloir mettre le site classĂ© sous cloche, nous souhaitons responsabiliser le public pour quâil en profite dans de meilleures conditions et nous lâorientons vers des pratiques de dĂ©couverte respectueuse de lâenvironnement ». Au lieu dâinterdire en accumulant les panneaux ou les grillages ou dâassister en multipliant les poubelles, les agents visent Ă impliquer les visiteurs et Ă les interpeler sur lâimpact de leur comportement sur lâenvironnement.
Responsabiliser au lieu dâassister
Un plan de zonage a ainsi Ă©tĂ© crĂ©Ă© dans le but de partager lâespace entre les diffĂ©rents usagers en fonction de la spĂ©cificitĂ© de chaque activitĂ©. Quâil sâagisse de la plongĂ©e, de la plaisance, de la pĂȘche ou de la simple baignade, les usagers prennent mieux conscience de leur responsabilitĂ© quand un espace leur est dĂ©diĂ©. « Sâils veulent retrouver le site aussi prĂ©servĂ© lâannĂ©e suivante, ils font des efforts pour ramener leurs dĂ©chets personnels sur le continent ou pour ne pas collecter ni toucher la faune et flore ». Mais si la prise de conscience des visiteurs est effective, leur nombre sur lâĂźle est loin de rĂ©gresser durant la saison estivale…